Le “nuage” se veut aérien, au-dessus de chacun et accessible presque en tendant les bras. On y verrait presque quelque chose d’immatériel mais le cloud est bien terrestre et physique. Il représente un ensemble de serveurs disséminés à travers le monde et dont l’accessibilité par tous permet aux utilisateurs et aux entreprises de s’affranchir de la nécessité de gérer des serveurs physiques eux-mêmes ou d’exécuter des applications logicielles sur leurs propres équipements.
Le monde de l’entreprise y a rapidement vu l’opportunité de se séparer de l’équipe de barbus qui demande régulièrement du budget pour être à jour et pouvoir se recentrer sur son cœur de métier. Côté utilisateur, finit la perte de ses données qui vont de paire avec la disparition de leur device. La synchronisation des données de compte semble magique la première fois qu’on l’expérimente.
Le marché est donc en croissance exponentielle avec 20 % (70% pour le marché chinois en 2020) de plus chaque année et comme souvent dans le domaine, la plus grande part du gâteaux est partagée par les entreprises américaines et chinoises : AWS (Amazon Web Services), Azure (Microsoft), et GCP (Google Cloud Platform), Alibaba Cloud, Huawei Cloud, Tencent Cloud …
Alors pourquoi cet article sur le cloud Français ? Comme indiqué plus haut, le cloud est bien terrestre (voir sous-marin) et se situe donc dans les limites d’un État qui a ses propres lois. Pour faire simple, si vos photos sont sur un disque dur dans un serveur en Californie alors elles sont soumises à la loi californienne. Capitalisme oblige, certaines régions mettent en place des législations souples afin d’attirer ces sociétés et vous vous retrouvez à perdre la propriété de vos données. Mais pas d’inquiétude c’est écrit dans les conditions générales que vous devez avoir lues …
La question qui se pose (par vous, et le gouvernement) est comment garder la souveraineté sur les données gouvernementales (et les données de la population) tout en restant compétitif.
Le cloud Français
Au vu du retard pris par la France sur le marché du cloud, le gouvernement Français tente depuis 2009 d’accélérer son développement. Les projets Cloudwatt et Numergy sont lancés en 2012 avec une enveloppe budgétaire de 75 millions d’euros. Malgré deux tentatives de relance (par Orange en 2015 et par SFR en 2016), la concurrence ne leur laisse aucune chance. L’américain AWS pèse déjà 17,5 milliards de dollars de chiffre d’affaires en 2016 (45,4 milliards en 2020).
La France insiste et veut et doit renouer avec son savoir-faire technologique dans ce domaine. Fin 2021, elle annonce un plan d’investissement de 1.8 milliards d’euros financé par l’Etat (667 millions d’euros), l’Union européenne (444 millions d’euros), et le secteur privé (680 millions). lien Et même si le gouvernement travaille de son côté, de nombreuses sociétés françaises ont réussi à s’implanter dans le paysage informatique et certaines n’ont plus rien à prouver.
L’un des avantages des sociétés européennes / Française est la conformité aux règles mises en place dans le cadre du RGPD qui protègent l’utilisateur bien plus que la majorité des marchés mondiaux.
Le RGPD (Règlement Général pour la Protection des Données lien ) est au centre des enjeux du numérique, deux évènements récents médiatiques d’importance ont eu lieu : les menaces de la société Meta (Facebook) de ne plus mettre à disposition ses services en Europe lien, ainsi que la toute récente décision de la CNIL de qualifier comme illégaux les transferts de données de Google Analytics à l’international lien.
Un choix compliqué
Pour une entreprise, une start-up, une association, ou même un particulier qui souhaitent expérimenter un peu, le choix d’un Cloud n’est pas chose aisée.
Les besoins sont souvent très larges. Une entreprise souhaitera potentiellement un large éventail de services (allant de la simple VM au machine learning) avec tout l’outillage et l’automatisation possible, alors qu’une association aura simplement besoin d’un hébergement pour son site web. Une entreprise internationale, elle, pourrait souhaiter pouvoir déployer ses applications tout autour du globe, afin de proposer des services personnalisés, ou de meilleurs temps de réponse.
Il est alors facile et tentant de s’orienter vers les clouds des géants américains : AWS (Amazon Web Services), Azure (Microsoft), et GCP (Google Cloud Platform). Ils proposent de nombreux services, une offre gratuite alléchante, pratiquent un lobbying intense auprès des start-ups, à coup de crédits offerts.
Il est également à noter que cette omniprésence des leaders sur le marché facilite l’échange de ressources humaines n’ayant pas à être formées car déjà adeptes du vaste catalogue disponible. On ne cherche plus un architecte mais un expert GCP ou AWS.
Certaines entreprises, lors du choix de leurs solutions d’hébergement, se posent la question de la concurrence du Cloud avec leurs propres activités. C’est d’autant plus vrai dans le secteur du retail, où Amazon est omniprésent. Nombre d’entreprises excluent d’utiliser les services d’AWS, pour ne pas venir engraisser le chiffre d’affaires d’un concurrent direct. Il pourrait en être de même pour Google par exemple, qui n’hésitera pas à placer la publicité du concurrent en haut des résultats de recherche si celui-ci paie le prix fort.
Enfin, au-delà des enjeux de localisation des données, qui est souvent la partie la plus visible de l’iceberg (rappelons que les géants américains proposent des datacenters partout en Europe, et aussi en France), il se pose aussi la question de la dépendance de nos entreprises, start-up et associations à des entreprises américaines.
Des offres florissantes et des idées qui germent
Les types de cloud
Il convient avant tout de rappeler les typologies de cloud, avec les différents niveaux de services associés :
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IaaS : Infrastructure as a Service. Il s’agit ici de “louer” une infrastructure complète virtualisée. Un IaaS propose le plus souvent l’accès à des machines virtuelles, du réseau virtualisé et d’autres services d’infrastructure, comme du DNS ou du load-balancing.
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PaaS : Platform as a Service. Dans cette approche, le provider de Cloud s’occupe de la gestion de l’infrastructure, et fournit une plate-forme pour l’hébergement des applications, ou des données. On y retrouve les hébergements applicatifs, et les bases de données managées par exemple.
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SaaS : Software as a Service. Ce dernier modèle concerne la mise à disposition d’un logiciel par un fournisseur. Ce type de service ne sera pas évoqué dans cet article.
On pourrait aussi y lister le CaaS (Container as a Service) et le FaaS (Function as a Service)
Du point de vue de la diversité de l’offre de très nombreux acteurs sont présents sur le marché
https://www.g2.com/categories/cloud-platform-as-a-service-paas
Un échantillon représentatif
IaaS
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Scaleway (Iliad) : https://www.scaleway.com/fr/
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Outscale : https://fr.outscale.com/
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Hopla.cloud : https://hopla.cloud/
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Nua.ge : https://nua.ge/
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OVH Cloud : https://www.ovhcloud.com/fr/
PaaS
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Clever-Cloud : https://www.clever-cloud.com/
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Scalingo: https://scalingo.com/fr
Donc pourquoi pas
L’offre française n’a donc rien à envier aux leaders mondiaux et répondra à la grande majorité des besoins standard voir même un peu exotique des entreprises comme des particuliers. De nos jours, cette démarche pourrait être presque considérée comme engagée car nécessitera un investissement en termes d’analyse de l’offre, de temps de formation des équipes et pourrait nécessiter un surcoût financier au démarrage comparativement aux offres promotionnelles agressives des géants du cloud. Mais le jeu n’en vaut il pas la chandelle sachant que vous aurez construit un écosystème où vous saurez que vos données et celles de vos clients seront protégées et resteront en adéquation avec une législation toujours plus respectueuse de l’identité numérique. Dans un monde où nos données bancaires voire nos données de santé sont partagées avec des enseignes de grande distribution il est important de mériter la confiance parfois aveugles des utilisateurs.