Notre cerveau

Pour pouvoir traiter toutes les données qu’il reçoit, le cerveau à besoin de faire du tri. Il doit repérer les informations importantes et les traiter rapidement : une odeur de brûlé, une voiture qui passe, le chien réclame à manger, votre fils ne fait plus de bruit dans la piscine. Il doit aussi gérer efficacement sa mémoire. De quoi dois-je me souvenir ? Est-ce que cette information me servira plus tard ou est-ce que je peux l’oublier ? Ces deux informations se contredisent et donc, laquelle dois-je retenir ? Au fil de l’évolution, le cerveau a appris à faire tout ça de manière automatique et inconsciente. On peut donc distinguer 4 stratégies que le cerveau utilise pour optimiser son fonctionnement. (Il faut filtrer la masse d’informations qui arrive en gardant celles qui nous sont familières et rejeter celles qui s’opposent à ce qu’on pense savoir)
- Eliminer le superflu
- Identifier ce qui est utile
- Mémoriser ce qui sera peut être utile plus tard
- Faire vite

Pour parvenir à faire tout ça, le cerveau a recours à de nombreux raccourcis, qui lui permettent de sauter à des conclusions qui en général sont plutôt correctes. Ces raccourcis s’appellent “Les heuristiques”
Mais dans le monde actuel, les informations que nous recevons sont de plus en plus nombreuses et complexes. Il y a des tas de situations qui sont trop subtiles pour ces raccourcis et pour lesquelles le cerveau tire de mauvaises conclusions. On appelle alors ces raccourcis ratés, des “Biais cognitif” Voir des liens là où il n’y en a pas. Créer des catégories ou des stéréotypes faux. Se souvenir plus facilement de situations qui sont en accord avec nos préjugés. Ignorer les indices qui ne correspondent pas à nos opinions. Tout ceci fait partie de la grande famille des biais cognitifs. Même si les limites entre biais peuvent être assez flous, on peut essayer de les ranger en grande catégorie qui rappellent assez les 4 points dont on a parlé tout à l’heure.
- Eliminer le superflu On cherche à repérer plus facilement ce qui nous est familier et à considérer que les autres ont plus tendance à se tromper que nous.
- Identifier ce qui est utile On cherche à trouver des significations là où il n’y en a pas. A trouver des corrélations illusoires et à nous méprendre sur ce que pensent les autres.
- Mémoriser ce qui sera peut être utile plus tard On cherche à mémoriser plus facilement les événements marquants ce qui nous pousse à généraliser. Le cerveau nous fait modifier nos souvenirs en fonction de choses que nous apprenons plus tard.
- Faire vite On cherche à prioriser ce pour quoi nous avons déjà investi du temps. Ce qui paraît le plus simple. Et ce qui donne l’impression que notre action a un impact important et immédiat.

Daniel Kahneman et Amos Tversky ont classé les heuristiques et leurs biais associés en quatre catégories.
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La représentativité
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La disponibilité
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L’ancrage
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L’ajustement
Par exemple, l’exploitation des biais cognitifs est l’une des bases de la publicité moderne. Voici deux exemples d’utilisations de ceux-ci :
75% des 25-30 ans utilisent ce produit, qu’attendez vous ?
Comme si le fait que beaucoup de gens l’utilisent rendait ce produit plus efficace. Au-delà de son taux d’utilisation, d’autres paramètres peuvent expliquer sa popularité.
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Son prix
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Sa disponibilité
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Une campagne de pub Agressive
Slogan de la FDJ 100% des gagnants ont tenté leur chance. Ici on est en plein biais du survivant. On semble oublier le fait que 100% des perdent aussi on tenté leur chance. Et ils sont beaucoup beaucoup beaucoup plus nombreux.

Les pièges de la pensée
Un des biais les plus répandus est le fait de se croire à l’abri des biais. C’est le premier qu’il faut savoir reconnaître chez soi pour pouvoir en éviter d’autres. J’ai plus souvent raison que les autres, vous aussi non? C’est ce que je remarque souvent. J’ai une explication concernant quelque chose et je trouve d’ailleurs facilement des éléments qui confirment ce que je pense. Pire que ça, ceux qui ne sont pas d’accord avec moi ont toujours recours à des arguments moisis et refusent d’entendre raison. Parmi tous les biais, le biais de confirmation est probablement le plus fréquent. Quelque soit le domaine, politique, science, vie quotidienne, dès qu’on a un avis ou dès qu’on apprend quelque chose on s’expose au biais de confirmation. Le biais de confirmation c’est quoi? C’est notre tendance à chercher à confirmer ce qu’on croit déjà. Il peut s’agir du fait de ne pas chercher plus loin une fois qu’on a trouvé un exemple qui confirme ce qu’on pense. Mais ça consiste aussi à donner plus de poids à des infos qui confirment notre premier avis même quand on a cherché et trouvé, des informations qui le contredisent.
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On peut visualiser différentes variantes de ce biais : La plus évidente consiste à ne chercher que des informations qui confirment notre idée de départ.
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Une autre variante est de faire une observation et de se dire qu’elle va dans le même sens que ce que l’on croit et oublier de se questionner si on aurait pu observer la même chose même si notre théorie était fausse.
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La mémorisation sélective des informations qui confirment nos propres convictions.
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Une autre manifestation de ce biais est le fait d’interpréter de manière biaisée, notamment par des corrélations illusoires des évènements perçus à tort comme étant liés ou associés.
Imaginons que vous pensez que vos clés sont dans votre chambre parce que vous vous rappelez les avoir mises là en dernier. Quelques heures passent et vous devez maintenant récupérer vos clés. En principe, elles pourraient maintenant être n’importe où dans votre maison, car quelqu’un pourrait les avoir changées de place. Mais ça serait stupide de commencer par aller vérifier dans la cuisine, la salle de bains, le salon, avant d’aller vérifier dans la chambre ! Si vos clés ne se trouvent pas dans la cuisine, vous n’êtes pas plus avancés pour savoir si votre croyance, que les clés sont dans la chambre, est vraie ou fausse. Dans ce cas, utiliser une stratégie de “test positif” se révèle très efficace dans la vie de tous les jours.

L’expérience de du Dr Peter C. Wason en 1960 a montré que le biais de confirmation était prédominant chez tout le monde. Ce qui nous empêche d’évaluer correctement des hypothèses. Voyons en quoi consistait cet expérience
L’objectif était de trouver quelle règle avait permis de déterminer un triplet de nombre. Le triplet [2;4;6] avait été établi comme correspondant à la règle. Les personnes testées pouvaient ensemble proposer leurs propres triplets de nombre et l’auteur du test leur disait si oui ou non ces triplets correspondaient à la règle ou non. Bien que la règle était juste une “une séquence de nombre croissant”, les personnes testées avaient beaucoup de difficultés à arriver à cette conclusion proposant souvent des règles beaucoup plus spécifiques comme “le nombre du milieu est la moyenne du premier et du dernier”. Les participants ne restaient que des exemples positifs, c’est-à-dire des triplés qui obéissent à leurs propres hypothèses. Par exemple, si leurs hypothèse était “On ajoute 2 au nombre suivant”, alors ils proposaient des triplets qui correspondaient à cette règles comme [11;13;15] plutôt que des triplets qui pouvaient invalider cette hypothèse comme [11;13;20]. Watson interprète ces résultats comme illustrant une préférence pour la confirmation vis-à-vis de l’information. D’où le terme de “Biais de confirmation”.

Pour conclure
Les heuristiques sont un mécanisme indispensable et ils fonctionnent la plupart du temps très bien. Mais il est important de garder l’esprit critique, de savoir reconnaître les biais et de les éviter car ils peuvent entraîner de très mauvais effets dans un cadre professionnel par exemple. Il est important de se questionner sur ses connaissances, ses opinions et ses croyances et de s’accorder du temps pour prendre du recul face à eux. Reconnaître ses propres erreurs et ses propres biais est un pas de plus vers la préservation de son esprit critique.